03/09/2015

Art. Jose Cunéo, un Argentin à Paris

José Cunéo devant ses boîtes lumineuses aux airs de maquettes de décors de théâtre. Photo Florence Martin.

En France depuis 29 ans, José Cunéo a conservé son accent chantant et une fantaisie poétique et grivoise qui n’est pas sans évoquer son compatriote Alfredo Arias, pour lequel il réalise des story-boards en bandes dessinées et des maquettes préparatoires de certains décors de scène. Cet Argentin fou de dessin depuis sa prime enfance débarque à Paname en 1986. Il devient illustrateur pour Pif gadget et Gai-Pied Hebdo. Les années 80 sont celle de l’épidémie du sida et la prévention du virus est alors un des chevaux de bataille de José, à grands renforts de crayonnés alertes. Peintre et auteur de BD par ailleurs, le jeune artiste sympathise avec l'entourage de Copi dont l’univers inspire ses personnages et les situations de ses ouvrages. Parmi eux, le Mariage de Roberto (1999) - BD satirique aux avant-goûts de lutte pour le mariage pour tous - est à son image : toute en truculence et décalage. Plus parisien que le plus parisien d’entre nous, l’homme habite et travaille aujourd’hui à la Goutte d’or, au cœur du 18e, quartier dont il affectionne la chaleur humaine.

Villa paradis des chats ou les toits de Montmartre la nuit.

Boîtes lumineuses et scènes de la vie quotidiennes. En plus de ses BD,  José crée des dioramas. Des boîtes lumineuses que je qualifierais de magiques, tant il en sort des histoires merveilleuses qui semblent s’animer sous nos yeux. Et cela sans même frotter ladite boîte, comme on le ferait d’une lanterne d’Aladin. Ces créations graphiques en carton et 3D sont éclairées par le fond grâce à un système de LED qui génère une ambiance intime, voire mystérieuse. Elles donnent à voir des scènes de la vie quotidienne : toits de Montmartre la nuit, devenus le repère de chats efflanqués ou contre-plongées sur des cours d’immeubles dont les fenêtres éclairées révèlent l’intimité des Parisiens. J’aime l’univers chaleureux et loufoques de ces œuvres qui évoquent les pop-up de notre enfance. Mais des pop-up en version BD parfois trash dont certains personnages sortent direct des films d’Almodovar. Rossy de Palma est du reste un des modèles de prédilection de Cunéo qui s’inspire également des ambiances de son Buenos Aires bienaimé.

José capture les scènes de votre vie quotidienne dans ses boîtes
personnalisées. Ici il s'invite Chez Célia.

A la commande. L’artiste travaille aussi à la demande pour vous offrir un instantané de votre cadre de vie perso, revu et corrigé par son regard malicieux. Pour vous offrir une de ces boîtes lumineuses, il vous suffira de l’inviter chez vous quelques heures afin qu’il s’imprègne de votre train-train quotidien et de la déco de votre intérieur. Le bain du petit dernier, les gammes de votre ado répétant au piano ou le tapis persan du salon, cadeau de bonne maman… Ces détails vécus feront le sel d’objets artistiques témoins de votre vie qui remplaceront avantageusement les portraits compassés et autres photos de famille dans le salon !

- Contact José Cunéo (son atelier de Paris) : 01 42 52 14 48 ; cuneo@live.fr



01/08/2015

Domination, alcool, sexe : le cocktail explosif de The Servant


Maxime d'Aboville et Xavier Laffite, serviteur
et maître. Photo Brigitte Enguerrand.
Alors voilà, aujourd'hui c'est mon anniversaire et c'est moi qui fais le cadeau. Et pas n'importe lequel. Je vous offre un bijou, une pièce de maître que vous aurez du mal à porter à l'annulaire, mesdames, puisqu'il s'agit de théâtre. The Servant qui fut monté sur grand écran par Joseph Losey avec l'inoubliable Dirk Bogarde dans le rôle du serviteur machiavélique est aujourd'hui adapté à la scène du théâtre de poche Montparnasse par Thierry Harcourt, d'après une traduction du texte de Robin Maugham. Et franchement, Dirk peut aller se rhabiller. J'exagère, certes, mais l'interprétation toute en retenue butée et en noirceur de Maxime d'Aboville en Barret (le valet), celles de l'affriolante Roxane Bret, sa complice, et de Xavier Lafitte en Tony (l'aristo cossard) qui passe d'une partition à l'autre avec un naturel désarmant sont du grand art. Maxime d'Aboville a d'ailleurs remporté le Molière du comédien de théâtre privé en 2015 pour son rôle. Perso, j'ai craqué plus encore pour le beau Xavier. Et n'allez pas croire que sa ressemblance avec Hugh Grant y soit pour quelque chose. Ou si peu… Sans rire, la finesse de son jeu m'a rappelé celle de Mesguich-père.  Quant au récit, celui d'une manipulation où les rôles entre maître et valet s'inversent, c'est une réussite de suspens psychologique. Cette comédie aux accents british parle de choses graves - la domination jusqu'à l'anéantissement d'un être par l'autre, en l'occurrence - avec un légèreté virevoltante, sur fond de jazz des années 50. Preuve que la gravité n'est pas forcément plombante. C'est du reste sans nous en apercevoir, ou presque, que nous sommes aspirés vers l'abîme sans fond que creusent les pervers sous leurs victimes.Violences conjugales, politiques sans scrupule, petits chefs harceleurs… L'histoire est universelle et la mécanique des manipulateurs de tous poils savamment décortiquée. J'y vois au moins une morale. Allez (le plus souvent possible) au théâtre, cela vous évitera bien des déboires !

- The Servant de Robin Maugham, traduction de Laurent Sillan et mise en scène de Thierry Harcourt au théâtre de poche Montparnasse, 75 bd du Montparnasse, Paris 6. Jusqu'au 12 juillet puis du 1e septembre au 8 novembre, du mardi au samedi à 19h et dimanche 17h30 . Tél. 01 45 44 50 21 ; www.theatredepochemontparnasse.com
 

31/07/2015

Mustang. Liberté, égalité, féminité ou le rêve d’une jeunesse turque



J’aime fixer longtemps le paysage depuis la fenêtre du TGV, puis fermer les yeux et voir défiler comme en surimpression les champs de blé et la campagne. Depuis quelques nuits défilent ainsi derrière mes paupières closes les scènes de la vie des jeunes héroïnes de Mustang. Et ce premier long-métrage de la réalisatrice turque Deniz Gamze Ergüven n’a pas fini de me poursuivre jusque dans mes rêves. Je lui décerne même sans hésiter la palme d’or de mes préférences cinématographiques en 2015. Une distinction qui lui portera au moins autant chance que d’avoir été sélectionné pour la quinzaine des réalisateurs à Cannes. Enfin, j’espère.

Sauvage et indomptable. De la première séquence où une fillette quitte en pleurant son enseignante en ce dernier jour de classe avant les vacances -  image moins innocente qu’il n’y paraît dans une Turquie rurale où la scolarisation est un luxe dont on prive facilement  les jeunes filles -  à la dernière scène, Mustang réussit le tour de force de dénoncer l’oppression des femmes par certains hommes obsédés par la sexualité et d’être un hymne à la pureté de l’adolescence féminine. Le mustang est un cheval sauvage. Pour Deniz Gamze Ergüven il symbolise le tempérament fougueux, indomptable, des jeunes filles turques. Cette énergie porte littéralement un récit où la quête de liberté est une urgence, une question de vie ou de mort.  Plus touchantes les unes que les autres, les cinq comédiennes qui interprètent une même fratrie transcendent l’écran.
Dénonciation du conservatisme rampant dont les femmes sont les premières victimes en Turquie et message d’espoir en une jeunesse qui se bat pour son avenir, Mustang est un chef-d’œuvre. Pressez-vous de le découvrir dans les quelques salles où il passe encore -  il est sorti le 15 juin, je me réveille tard - pour que ses images enchantent les rêves de vos longues nuits d’été. Eté que je vous souhaite aussi radieux que le sourire de la petite Lale dans Mustang !

25/06/2015

Prendre l'air à une heure de Paris

(De gauche à droite) l'église Saint Gilles et la vue sur Rochefort depuis son cimetière. L'étang des 3 Ducs à Bonnelles.
Quand le chat commence à tousser - avoir un chat allergique, il n'y a qu'à moi que ça arrive - c'est que l'air parisien est bien vicié. Il est temps de mettre les voiles pour aérer mes petits poumons. A 1h de voiture  (50 km), en plein parc de la vallée de Chevreuse, Rochefort-en-Yvelines est un paradis. Ruelles pavées, maisons anciennes aux porches surmontés d'armoiries et fenêtres à meneaux, ce charmant patelin est une ancienne place forte gauloise. L’église Saint Gilles qui le surplombe est croquignolette et les randonnées, au départ du village ou à proximité, sont l’occasion de se dérouiller les gambettes. Au gré des parcours, on traverse des forêts de chênes, hêtres, bouleaux ou noisetiers, on longe des champs de blé que réveille la floraison printanière des coquelicots et des étangs romantiques, comme celui des Trois Ducs. On découvre aussi de ravissants villages - Bonnelles ou Bullion, notamment - sans pouvoir toutefois étancher sa soif d'un Monaco. On est à la campagne, je vous dis, pas à Paris. Mais la promenade terminée, les restaurants de Rochefort sont là pour reprendre forces et calories. Le plus tradi, l'Escu de Rohan est aussi le plus savoureux. On y déguste un foie gras maison pas mal du tout. Mais la terrasse du jardin du Brigandville vaut aussi le détour aux beaux jours.



Et encore. A plus ou moins 10 kms de Rochefort, ne ratez pas la petite ville de Chevreuse et son château fort haut perché. De loin, il est magnifique mais je vous avoue que mes mollets ont crié grâce et que je ne l'ai pas visité. En revanche, j’ai fait un tour à la boutique du bar à sirops faits-maison l'Alchimiste. Celui au gingembre est exquis ! Avant de rentrer, un petit crochet par la Jardinerie de Chevreuse, pépiniériste imbattable côté prix et bien achalandé, m'a permis de refleurir mes balcons parisiens. Je suis assez fière de mon oranger mexicain. Mon amoureux, de ses semis de patates. C’est moins glamour, mais plus nourrissant dit-il.


 Où dormir et se promener ?
• Au coeur du village, Le Nid de Rochefort 
est une chambre d'hôtes bien placée dont le
 propriétaire est aussi sympa que disert.
 Comptez 90 € la nuit.
• Le site du parc naturel
de la Haute Vallée de Chevreuse
 propose une sélection de promenades.
Je vous conseille Le rallye de Bonnelles
à Rochefort et Sensations originelles
(13 kms environ).

11/06/2015

One man show. Quand rire devient du grand art

Mi-conférencier mi-clown, Jos Houben démonte et démontre les mécanismes du rire. Photo Giovanni Cittadini Cesi.

L'homme est digne. L'homo sapiens, j'entends. Depuis qu'il a acquis sa verticalité, il domine les autres espèces, bien campé sur ses deux pieds. Mais, du même coup, il a conscience de ce qu'une perte d'équilibre peut lui coûter. Que son pareil trébuche et il sourit, qu'il se casse la figure et voici notre homme qui éclate de rire. D'un rire franc, spontané, incontrôlable. Comme celui qui nous secoue  devant la démonstration "scientifiquement prouvée" de Jos Houben. Un expert du rire, décalé comme les Belges savent l'être, qui décrypte les mécanismes du rire sur la grande scène du théâtre du Rond-Point.

Le vrai sujet du rire, c’est le corps des choses. Pendant dix ans, Jos Houben a parcouru le monde pour enseigner le mouvement, le théâtre gestuel et burlesque. Devant ses élèves, il analysait, preuve à l'appui, comment un port de tête, une démarche, une maladresse pouvaient déclencher le rire. Petit à petit, le bouche à oreille a fonctionné et ses cours se sont remplis de spectateurs, venus se bidonner aux côtés des étudiants. Et l'artiste a décidé de tirer parti de ses talents pour se produire devant le grand public. La première partition de l’Art du Rire est ainsi née en 1998. Entre master class et théâtre, sa dissection des dessous du rire est un pur régal. On y apprend quand, comment et pourquoi on rit. Et, chaque soir, le public s'esclaffe aux mêmes moments. C'est Jos qui le dit et je le crois. Bien volontiers. De même que je ne doute pas que, comme moi, vous vous fendrez la poire en le voyant mimer le camembert. Et vous gondolerez derechef en l'observant tenter de retrouver sa dignité après avoir chuté. C'est à se rouler par terre.

- L'Art du rire, un spectacle de et avec Jos Houben,  du 2 au 28 juin à 18h30,  théâtre du Rond-Point, Paris 8e. Réservations. 01 44 95 98 21 www.theatredurondpoint.fr

24/04/2015

Les Artychauts. Une galerie d'art pour les kids

(de gauche à droite) Tirages limités  extraits du film d'Alê Abreu Le garçon et le monde, du long-métrage d'animation Ernest et Célestine de Monique Martin et d'albums Jean-Michel le Caribou de Magali Le Huche. 3 exposants au festival d'Annecy 2015.

Souvenir d’une enfance pas si lointaine (enfin, dans ma tête), une petite toile continue de trôner dans ma chambre. Elle représente un oiseau bleu captif d’un encrier dont s’échappe juste la longue plume de sa queue. Clin d’œil prémonitoire à la plumitive que je suis devenue, ce cadeau d’une de mes tantes fut ma première d’œuvre d’art « à moi ». Et je me souviens encore de la fierté éprouvée lorsque je l’ai sortie de son papier d’emballage...


Pour collectionneurs en herbe. Galerie d’art pour enfants créée sur le net en octobre dernier par Barbara Tonelli et Fanny Husson-Ollagnier, les Artychauts regroupent une trentaine d’artistes. Des illustrateurs, essentiellement, venus de France, du Brésil, d’Italie, du Portugal, du Japon, d’Iran… « L’illustration reflète la culture d’un pays, ses couleurs, son univers graphique » note Barbara Tonelli. Ces images du monde sont des pièces uniques (vendues autour de 400 €), ou des tirages en séries limitées (à partir de 30 €). Elles ouvrent des  horizons aux enfants dont elles commencent à former l'oeil pour en faire des amateurs d’art de demain. Et font de délicieux cadeaux à offrir aux jeunes parents pour décorer la chambre de leurs petits Jules ou Clémentine.Accessibles sur  l’e-shop des Artychauts, les illustrations et autres objets artistiques – boîtes, coussins et lampes, notamment -  sont aussi vendus lors d’expositions éphémères, où les artistes invités animent des ateliers créatifs pour enfants. Vous y croiserez parfois Cécile Landowski dont quelques originaux sont en vente sur le site. La prochaine expo aura lieu au cinéma Décavision d’Annecy du 15 au 20 juin, dans le cadre du festival international du film d’animation. Les Artychauts exposeront aussi au salon Maison&Objet à la rentrée. Rendez-vous sur leur stand !


"Attrape-moi si tu peux", illustration pleine d'humour  de Tullio Corda
- La galerie d'art, le net   : www.lesartychauts.com

02/04/2015

Lisa Pearl, la mode joliment rétro


Cette semaine, il me vient des envies d’embardées printanières et futiles du côté d’une petite griffe qui a du chien. Lisa Pearl est une marque de vêtements créée par Isabelle Simonet qui fabrique ses modèles en binôme avec un façonneur, dans son atelier parisien de la cité Popincourt, dans le 11ème. La créatrice, chimiste de formation reconvertie dans la broderie puis la couture -  c’est plus fun, il faut reconnaître - s’inspire des années 20 en raccourcissant les modèles.

Ultraféminines silhouettes. Hits de ses collections, les petites robes aux coupes près du corps mais pas moulantes, ont de ravissants décolletés drapés ou plissés qui libèrent le cou et mettent en valeur les petites poitrines. La styliste conçoit ses modèles en les essayant sur elle jusqu’à être ultra confortable et ça se sent. Les tissus viennent d’Italie et parfois des fins des coupons haute-couture et sont faciles à entretenir. Leurs imprimés discrets, souvent dans les tons de marine, noir ou vert (et corail ou rose, cet été), sont chics et faciles à porter. Tout comme les modèles des robes qui se prêtent aussi bien à une tenue casual, avec des bottes de motardes ou à une petite soirée, avec des stilettos et une veste courte.

- Les modèles Lisa Pearl sont en vente à la boutique Rose Durantin, 30 rue Durantin, Paris18e et dans d’autres points de vente à Paris et en province. Pour en savoir plus et être informés des ventes privées, rendez-vous sur facebook.


Les + : les modèles rétros très féminins des robes,
jupes et vestes, en séries limitées.
L’inspiration de l’été. Les imprimés Lisa Pearl
 filent les thèmes du végétal et des voyages.
Une envie de vacances, peut-être ?
Les prix. Autour de 180€ les robes, 80-90€ les tops et jupes.

12/03/2015

DVD. Le Dernier Coup de Marteau, l'émotion sans pathos

Comme Angèle et Tony, premier long-métrage d’Alix Delaporte dont Clotilde Hesme et Grégory Gadebois furent déjà les talentueux interprètes, Le Dernier Coup de Marteau, deuxième film de la réalisatrice, passe vite sur le verbe. Ce sont les non-dits, portés par les regards et les gestes qui font sens. Et c’est la force de ce très beau film.

Une histoire simple. En deux mots, Alix narre la rencontre entre Victor, 13 ans, et Samuel,  père qu’il ne connaît pas. Chef d’orchestre émérite, Samuel – Grégory Gadebois à l’écran - vient diriger la 6ème symphonie de Mahler à l’opéra de Montpellier, dans la région où Victor vit avec sa mère, Nadia. Et c’est Nadia, ex-compagne de Samuel (formidable Clotilde Hesme) qui provoque une rencontre devenue indispensable. Car elle est atteinte d’un cancer incurable, devine t-on.

Si tu veux un père, apprivoise-le. Samuel, Nadia, Victor sont des êtres pudiques. La maladie, la rupture, le manque de père, ils n’en parlent pas. Et c'est à Victor seul, interprété par Romain Paul - véritable révélation du film qui vit son rôle avec une justesse et une retenue incroyables -, d'apprivoiser ce père un peu rugueux. Quitte à se faire jeter. A priori, en effet, on ne voit pas bien comment le lien peut exister entre l’ado footeux et le mélomane...
Sans être même esquissées, les questions sur le couple et la parentalité tissent la trame du film. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que rien ne va de soi. La tendresse existe, certes, mais elle ne protège pas l’enfant de la rudesse d’un monde d’adultes écorchés vifs. Armé de son seul sourire et de ce regard bien droit, bien clair, qu’il plante dans celui de Samuel, l’ado négocie l'approche. Doucement, il se fait adopter par ce père introverti et plonge dans la musique de Mahler, comme jadis il le fit dans l’eau d’une cascade avec sa mère.
Sa re(co)naissance est baignée par la lumière salvatrice de Claire Mathon, dont l'image magnifie aussi les paysages du Languedoc, où le tournage eut lieu. Une lumière douce, apaisante, qui laisse ouverte la porte vers l’espoir. Et pour ceux qui ont fait le rapprochement entre Alix Delaporte et moi, fins observateurs qu’ils sont, il existe bel et bien un lien de famille. Quant à vous rendre compte si ça influence mon jugement, vous le saurez en allant voir le film. Bonne séance !

- Le Dernier Coup de Marteau, film d’Alix Delaporte avec Clotilde Hesme, Grégory Gadebois, Romain Paul. Sortie du DVD le 19 août.


Bonus
Découvrez l’interview exclusive d’Alix Delaporte
 par Travis Bickle via la page facebook de Chapeau !

19/02/2015

Bonne table à Montmartre. Prenez le Maquis !


Kig Ar faz, le pot-au-feu breton.
Désolée pour les amoureux de la Corse, dont je suis, mais ce Bistrot du Maquis doit son nom à son emplacement sur la butte Montmartre, en lieu et place de l’ancien maquis, et son assiette n’a rien de méditerranéenne. Si André Le Letty, son talentueux chef breton, puise dans le terroir celte l’inspiration de certains plats, tels le Kig Ar Faz ou les sablés au beurre, c’est sans en rajouter. Ses recettes, un rien tradis (soupe aux potimarrons, rognons à la moutarde ou pressé de veau – un régal d’entrée -) s’autorisent quelques embardées exotiques, avec de ci de là des shiitakés ou des épices. Mais la touche demeure subtile, comme l’est la cuisine. Car de l’impeccable cuisson des poissons – chapeau pour le cabillaud demi-sel dont je me suis régalée ce soir-là – à celles du canard au sang, en deux services, les magrets d’abord, puis la cuisse « façon confit pas tout à fait confit » -  un hommage à la Tour d’Argent dont André fut premier sous-chef, tout est délicieux.

Dos de lieu jaune demi-sel à la vapeur, jus de coques.

L'ambiance en plus. L’accueil souriant de Madame, la gentillesse et le savoir-faire du chef qui a notamment exercé au Royal Monceau ou chez Taillevent, avant de monter l’Anacréon, l’Agassin (respectivement dans les 5 et 7e arrondissements) puis le Bistrot du Maquis, tout concourt à faire de cette maison un endroit auquel on s’attache vite. Jusqu’à avoir envie d’y revenir très, très souvent… D'autant que les prix sont raisonnables, eu égard à la qualité de la table : comptez à peine plus de 50 € pour un repas à la carte, verre de vin compris. Chéri, y’a rien dans le frigo, si on se faisait un restau ce soir ?


- Le Bistrot du Maquis. 69, rue Caulaincourt, Paris 18e Tél. 01 46 06 06 64.

05/02/2015

Théâtre. Chroniques du temps qui passe de François Morel

François Morel ou la mélancolie joyeuse. Photo Manuelle Toussaint.
Il entre en scène, seul en apparence. En apparence seulement, car avec lui entre son double : ce petit garçon imaginaire qu’il restera à jamais. Un enfant tendre, espiègle, qui fait exister une galerie de personnages un peu paumés, envoie sa balle dans le public, se travestit en fan de Sheila ou se rêve en Léon Zitrone surexcité commentant, non pas un tiercé, mais la naissance de Jésus à Bethléem. Et François Morel de pester contre l’haleine fétide du bœuf et l’hygiène approximative d’une crèche où cohabitent hommes, âne et… même un cochon. Tiens-donc, qu'est-ce qu'il fait ici, celui-là ?

La fin du monde est pour Dimanche. Sous prétexte d’un spectacle, un peu bricolé parfois, mais joliment, réécrit à partir de ses chroniques du vendredi pour France Inter, (celle du 9 janvier, deux jours après l’attentat contre Charlie, me valut un des moments d’émotion les plus intenses de la semaine) François Morel nous emmène dans son monde de finesse. Très loin des brutes. Un univers où il cultive le plaisir d'être un peu triste. Univers où l’insolite, les coïncidences deviennent la norme. Dans le métro me conduisant au théâtre du Rond-Point ce soir-là, d'ailleurs, je lisais un poche de Modiano... Si vous ne voyez pas le rapport avec la choucroute, allez voir La fin du monde est pour Dimanche. Une parenthèse enchantée en ce début d’année lugubre.

-  La fin du monde est pour Dimanche de et avec François Morel, Jusqu'au 28 février à 21h en semaine et le Dimanche à 15h au théâtre du Rond-Point, Paris 8. Net. www.theatredurondpoint.fr

08/01/2015

Livre. Luz ou le temps sauvage

Je ne saurais trop remercier ma libraire de l’Eternel Retour de m’avoir fait partager son coup de cœur pour Luz ou le temps sauvage d’Elsa Osorio. Un ouvrage qui entre direct dans le top je ne sais combien de mes préférences littéraires.

L’histoire. Mélange des genres entre roman historique et thriller, Luz etc., a pour toile de fond la dictature militaire que les généraux exercèrent en Argentine, de 1976 à 1983. Et narre l’enquête à rebondissements d’une jeune fille à la recherche de son passé et sa véritable famille. De la première à la dernière page, le livre nous tient en haleine en nous plongeant dans l’horreur absolue d’un régime qui évoque celui des nazis. Régime responsable de la mort ou la disparition de 30 000 personnes et de l’enlèvement à la naissance de 500 bébés nés de pères et mères dits « subversifs ». Des enfants qui furent ensuite confiés aux proches du pouvoir, quand ils ne furent pas élevés par les tortionnaires de leurs parents.

Quête identitaire. Palpitant, poignant, pittoresque aussi. Les adjectifs en P conviennent bien à ce livre dont une P… au grand cœur est une des protagonistes les plus attachantes. Roman de la lumière, au propre et au figuré – Luz est son héroïne, la recherche de la vérité, son propos – c’est aussi un hymne au courage et à cette lucidité féminine qui nous fait pressentir les non-dits et les secrets de famille, enfouis sous des tonnes de mensonge. OK les garçons ne sont pas toujours dénués d’intuition. Enfin, pas totalement... C’est juste une blagounette pour commencer l’année.

- Luz ou le temps sauvage d'Elsa Osorio - traduction de François Gaudry -  a été publié en 2000 par les Editions Metailié. Il existe aussi en poche.

Du même auteur
Aux Editions Metailié : Tango,
Sept nuits d’insomnie et La Capitana.
Devinez quelles seront
mes trois prochaines lectures ?